……. Ils sont venus et qu’ont-ils vu ? Si peu. Ils ont aperçu le dos du trailer qui les précédait, à peine davantage avec 150 mètres de visibilité. Alors, ils ont souvent regardé juste un peu plus loin que le bout de leurs chaussures et jeté parfois un coup d’oeil aux branches des arbres. Pour ne pas louper le fléchage au sol ou le morceau de rubalise pendouillant, mais tellement rassurant. Impossible de se situer par rapport à Epernay, cette vision sécurisante de la ville et du but à atteindre.
Ils se sont préparés et ils sont partis tôt le matin. Dans le brouillard. Une habitude. Ce n’est pas la première fois que des nappes d’humidité les accompagnaient avec les boucles de la Marne. Cependant, la montée vers Hautvillers permettait au soleil de percer et de disperser tout cet amas cotonneux. Comme un signe, comme cette porte de l’abbaye altavilloise restée close pour une fois, aucun rayon lumineux ne viendrait récompenser l’exigeante ascension vers le village perché.
Qu’à cela ne tienne. Puisque le paysage est masqué, puisque le froid prégnant s’enveloppe dans une apparente douceur initiée par cette bruine faite pour énerver les binoclards, hâtons-nous !!
Puisque nous sommes venus aussi pour apercevoir et que cette option a été retirée du programme, hâtons-nous vers le lieu d’arrivée.
C’est ce qu’ont réalisé les fusées du P’tiot Sparnatrail. Les avions à réaction de la patrouille de France du trail court ont réédité leur petit numéro qui les ont hissé sur les plus hautes marches du TTN : les Bruneaux, Istace, Mulot, Delefolly, Valour sont là qui filent grand train.
Ils sont une nouvelle fois à la poursuite d’Emmanuel Meyssat. Lequel a trouvé en la personne de Jérémy Pignard un allié en capacité de poursuivre la domination de cette fameuse garde ligérienne Meyssat-Pelle-Valour qui cadenasse les premières places du classement du TTN court 2011. A deux, c’est beaucoup mieux. Et l’avantage de se relayer se comptabilisera en un viatique appréciable de cinq grosses minutes à l’arrivée au Parc des Sports Roger-Menu d’Epernay. Pignard n’insistera pas pour la gagne. Il a bénéficié du travail d’une locomotive nommée Meyssat, sacrée cette année comme la meilleure du lot en remportant le grand chelem avec six premières places pour les six courses du programme auxquelles il a pris part.
Que va t’il bien pouvoir ambitionner en 2012 après avoir atteint la perfection ?
Peut-être essayer de suivre Jean-Jacques Moros ! Ce serait un challenge excitant. D’ailleurs, Bertrand Robinet et toute l’équipe du Jogging Club EpernayChampagne sont déjà quasiment assurés de la participation du dernier vainqueur de la Transe Gaule. Et ce que Jean-Jacques promet, Jean-Jacques tient.
Le Moros 2011, comme un millésime d’exception, aura tenu toutes ses promesses au Sparnatrail. En fait, il a carrément écrasé la journée et les trois courses (trail court, trail long, relais) par sa performance. Inouï de facilité ? Non, le Francilien confiera qu’il a souffert. Du froid, des cuisses et des genoux. Pourtant, il n’aura jamais donné l’impression de taper dans la caisse, d’être dans le dur. Un rythme, un style, cet homme-là. A voir les écarts créés entre lui et les autres – près de 24 minutes d’avance sur l’Aubois Jérémy Midavaine, deuxième, près de 33 minutes sur le vainqueur 2007, 2008, 2009 Michel Verhaeghe (pas très bien, il faut le dire, et seulement cinquième) – on en vient naturellement à établir un parallèle entre Moros et Jacques Anquetil. Oui, le champion normand, si délié, si souple sur sa machine et qui donnait l’impression de courir un autre Grand Prix des Nations que les autres coureurs s’élançant sur ce contre-la-montre long et exigeant, l’un des grands rendez-vous de la saison cycliste il y a une cinquantaine d’années. Moros, aujourd’hui, au niveau du trail, c’est à peu près ça. Cependant, vous ne trouverez nulle trace de lui dans les annales 2011 du TTN. Il a choisi sa liberté et il plane…