Depuis mes débuts dans la course à pieds, j’ai beaucoup de difficultés à franchir le cap des trois heures. Après deux expériences peu concluantes sur marathon, je pensais m’être fait à l’idée que je n’étais pas fait pour ça.
Les années passent et je reste admiratif devant les exploits des copains/copines de club qui s’alignent régulièrement sur des épreuves de 6h, 24h et ultra en tout genre et cela par tous les temps, franchement chapeau !
En 2010, après m’être blessé en début de saison, j’ai repris vers le mois de juin bien décidé à mettre fin à ce complexe d’infériorité en m’engageant sur le Sparnatrail.
Comme à l’habitude, je fus en difficulté dès le 30ème kilomètre avec des crampes qui ne m’ont pas lâché pendant près de 15 kilomètres. J’ai terminé la course plutôt bien mais toujours avec le sentiment que « ce truc-là, ce n’est pas pour moi ! ».
Pourtant, aller savoir pourquoi, j’ai décidé de poursuivre l’expérience en m’inscrivant sur les 80 kilomètres de l’Ecotrail de Paris 2011… sans doute que mon collègue Franck avec qui j’ai terminé le Sparnatrail y est pour quelque chose !
Bien décidé à ne pas rater le rendez-vous, j’ai suivi une préparation établie par Bruno H. Douze semaines à raison de quatre séances par semaine soit 6 à 9h d’entrainement par semaine, que c’est long !
Le jour « J » est arrivé, avec mon collègue Franck, nous retrouvons la bande des « guerriers » du Jogging (Jean-Claude, Claude, Hervé et Jean) sur la ligne de départ. Il est 12h30 quand le départ est donné sous une chaleur moite qui laisse présager une course difficile. J’ai décidé de prendre un départ ultra-prudent en suivant les copains du Jogging familiarisé à ce genre d’épreuve. Passé les deux premières heures de course, nous nous espaçons pour prendre chacun notre rythme de croisière. Je suis content, tout va bien et je reste concentré en regardant ma montre pour essayer de boire toutes les dix minutes.
J’ai déjà repris pas mal de concurrents et je suis avec Jean-Claude vers le 35ème kilomètre quand je commence à me sentir moins bien, j’ai sorti un gâteau de la poche que je n’arrive pas à manger et fini par le jeter, l’eau commence aussi à m’écurer et avant de tout régurgiter, je décide d’arrêter de m’alimenter et de patienter…
40ème kilomètre, les jambes commencent à se faire lourdes et je n’arrive toujours pas à boire et là l’hypothèse de l’abandon commence à me traverser l’esprit. Au 46ème kilomètre, plus vraiment dans la course, je passe un coup de téléphone à ma femme qui par le simple fait de parler me rassure et me remet en confiance. Je me force à boire quelques gorgées mais le mal est fait et comme on le dit dans ce genre de situation : j’en ai un bon coup derrière la casquette !
Arrive le bienfaiteur ravitaillement du 54ème kilomètre où je décide de m’attarder pour reprendre des forces, soupe, saucisson, fromage et coca j’avale un maximum de choses car l’appétit est de retour. La pluie c’est mise à tomber ce qui a pour effet de refroidir rapidement les organismes en surchauffe, ça fait du bien!
Après avoir pris près de 15 minutes pour recharger les accus, je décide de reprendre ma route, et là, rien à faire, impossible de courir, dès que je tente de courir, j’attrape de terribles crampes !
Je ne panique pas car je me dis qu’avec tout ce que j’ai avalé, dès que mes muscles vont être hydratés, ça va repartir. Effectivement, deux ou trois kilomètres plus tard les pas s’allongent et je reprends ma course vers la Tour infernale. La foulée se fait de plus en plus aérienne au point que je commence à reprendre tous les concurrents qui m’ont doublé plus d’autres, alors je commence à rêver que tout cela va continuer jusqu’à l’arrivée…
J’arrive au 70ème kilomètre et dernier ravitaillement, même si le rythme a légèrement baissé, je pense pouvoir me retaper et absorber rapidement les 10 kilomètres restants. Je reste au ravitaillement quelques minutes et repars bien décider à terminer pied au plancher. Les premiers pas sont lourds, les jambes ont perdu leur élasticité et ça va durer jusqu’à la fin, interminables ces quais de Seine et cette Tour Eiffel qui semble si proche et si lointaine à la fois !
Il est 21h52 lorsque je me présente au pied de la Tour d’acier. J’avale les escaliers heureux de toucher au but et je passe sous la banderole d’arrivée comme étourdi par la fin d’un long calvaire, franchement c’est dur et pourtant je le sais, c’est loin d’être le plus dur !
Au travers de ce témoignage, je rends hommage à tous ces hommes et ces femmes qui se lancent un défi et ont la volonté de l’accomplir jusqu’au bout.
Les mots ne font pas tout, il faut le faire pour comprendre…
Bravos à vous tous!